Le rôle des blogs dans la liberté d’expression

Publié 10 octobre 2005 par ginettelavigne
Les reporters sans frontières :
Guide pratique du blogger et du cyberdissident
 

Ce guide de 87 pages (Septembre 2005) nous est offert en format pdf (Adobe Acrobat 7.0, 1,54 Mo) ou en version HTML sous forme de liens hypertextes sur la page Web du site www.rsf.org des Reporters sans frontières.

 

Il est rédigé par plus d’un auteur (voir la liste*), il nous donne premièrement un aperçu de l’état de la blogosphère actuelle. Bien que la confusion règne au sein de la définition et de l’usage même des blogs, il n’y a pas de doute que celui-ci s’avère un outil formidable pour la liberté d’expression.

 

Julien Pain, responsable du bureau Internet et libertés de Reporters sans frontières, dit, selon les termes de Dan Gilmor du « Grassroots journalism », que les consommateurs d’information sont devenus les acteurs d’une nouvelle forme de journalisme, un journaliste à la racine, c’est-à-dire par le peuple et pour le peuple. [Page 5 du guide]

 

Il ajoute que dans certains pays, produire de l’information est une activité à risques, les bloggers ont tout intérêt à préserver leur anonymat car les cyberpolices sont devenus maître dans l’art d’épier la Toile.

 

Pour débuter, le guide nous informe sur les points suivants :

 

  • Définition et petit lexique du blogging
  • Le choix de l’outil parmi les principales communautés des bloggers
  • Petit mode d’emploi pour la création et la mise à jour des blogs, exemple concret de l’utilisation du système Civiblog* (www.cyviblog.org), l’ajout de flux RSS (really simple syndication),de trackbacks, etc.

Nouvelle adresse de Civiblog: http://www.civiblog.org/index.php

 

Une section : « Quelle éthique pour les bloggers? » suit, pour mettre en évidence la crédibilité de l’écrit du blogger.

 

 Dan Gillmor, fondateur de Grassroot Media Inc., énonce dans cette partie du guide :

 

« Tous les codes éthiques sont créés pour remplir une fonction essentielle : donner confiance. » Dans ce monde du « nouveau journalisme », où la simple écriture fait place au dialogue, le journalisme éthique dépend moins d’un code de déontologie que des valeurs et des principes d’un journalisme « honorable ». Ce type de journalisme s’appuie sur cinq piliers : la minutie, l’exactitude, l’impartialité, la transparence et l’indépendance. » [Page 23]

 

Olivier Andrieu, consultant indépendant dans le domaine d’Internet et spécialiste du référencement sur les moteurs de recherche, nous donne des conseils pratiques pour bien référencer son blog. [Pages 26 à 31]

 

Il dit que les blogs, par nature, sont bien positionnés pour le référencement car ses pages Web sont réactives aux critères de pertinences des algorithmes de classement utilisés par ces outils que sont les moteurs de recherche. En effet :

  • Les moteurs de recherche aiment les textes, les articles (posts) en contiennent généralement beaucoup
  • Chaque article fait en général l’objet d’une page Web spécifique (lien permanent ou permalink)
  • Le titre de l’article est repris le plus souvent dans le titre de la page « permalink » et dans son adresse url. Donc bien choisir le titre est primordial pour le référencement des moteurs de recherche
  • Les liens sont créés automatiquement, notamment pour les archives et sont textuels

Il nous en donne les raisons, des conseils, les avantages du référencement et quelques outils pour y parvenir.

 

Mark Glaser, journaliste pour Online Journalis Review (www.ojr.org), nous montre comment se distinguer, en fait, comment faire ressortir son blog du lot parmi les millions de blogs publiés.

 

Ses conseils : donner un ton personnel à son blog, l’actualiser avec rigueur, donner la parole aux lecteurs et avoir le courage de parler franchement.[Pages 33 à 35]

 

Après ces conseils judicieux de gens professionnels du milieu journalistique, le guide nous propose une série de témoignages de reporters sans frontières (voir les grandes lignes**) qui réalisent leur métier dans différents pays. Ces humanistes relatent l’expérience bénéfique des blogs pour offrir aux gens de la terre, parfois à leurs risques et périls, une expression libre qui fait défaut à certains pays.

 

Mark Glaser dans la section « Faire sortir son blog du lot » nous explique le rôle important que joue les blogs dans la liberté d’expression :

 

« Certains des bloggers présentés dans ce guide — Chan’ad Bahraini au Bahreïn, Yan Sham-Shackleton à Hong Kong et Arash Sigarchi en Iran — vivent dans des pays où les gouvernements surveillent de très près ce qu’ils écrivent. Le monde aussi est à l’affût de ces publications, trop content de lire ce que la presse locale n’ose pas raconter. Là où la liberté de parole et la liberté de la presse sont en danger, les bloggers sont un lien important avec la réalité quotidienne des gens. Les photos qu’ils prennent, les histoires qu’ils racontent, sont essentielles. » [Page 33]

 

Justement à cause du manque de liberté d’expression qu’offre ces quelques pays, Ethan Zuckerman, étudiant chercheur au Berkman Center for Internet Society de l’école de droit de Harvard, donne des conseils pratiques sur la manière de blogger de façon anonyme. Cela est très technique et n’est pas évident pour le commun des mortels. [Pages 55 à 62]

 

Il écrit :

« J’ai rédigé ce petit guide technique en me mettant dans la peau d’un fonctionnaire qui cherche à faire sortir des informations concernant un scandale dont il est le témoin, dans un pays où toucher à ce type de problème peut être dangereux. Ces conseils ne sont pas destinés aux as de la cryptographie, mais aux personnes qui, dans des pays peu respectueux de la liberté d’expression, s’inquiètent pour leur sécurité et veulent protéger leur vie privée. » [Page 55]

 

Nart Villeneuve, directeur de la recherche technique à Citizen Lab, suggère de choisir sa technique pour contourner la censure. Il dit que :

 

« Les systèmes de communications anonymes conviennent à des utilisateurs disposant de compétences techniques, qui ont besoin à la fois d’un service de contournement et d’anonymat, et qui utilisent d’autres services Internet que le simple trafic Web. Cette solution n’est pas adaptée pour ceux qui se connectent à partir de points d’accès publics. » [Page 78]

 

Il propose le sommaire suivant : [page 63]

 

·         LE FILTRAGE DES CONTENUS SUR INTERNET

·          LES TECHNOLOGIES DE CONTOURNEMENT

·          DÉTERMINER LES BESOINS ET LA CAPACITÉ À UTILISER LA TECHNOLOGIE

·          LES SYSTÈMES DE CONTOURNEMENT EN LIGNE

  • Les services publics de contournement en ligne
  • Les logiciels de contournement en ligne
  • Les systèmes de contournement en ligne : problèmes de sécurité

·          LES SERVEURS PROXIES

Les logiciels de serveur proxy

Les serveurs proxies publics

  • Localiser des proxies ouverts
  • Les proxies ouverts : ports peu fréquents
  • Les serveurs proxies : problèmes de sécurité

·          LE TUNNELING

·          LES SYSTÈMES DE COMMUNICATIONS ANONYMES

·         CONCLUSION


 

 LES CHAMPIONS DE LA CENSURE DU NET

 

Julien Pain donne des explications sur les pays qui excellent en censure sur l’Internet.

(Quelques citations seulement, voir les pages 83 à 86 du guide pour les textes complets)

 

LA CHINE : CHAMPIONNE DU MONDE !

 

« La Chine a été l’un des premiers Etats répressifs à comprendre qu’elle ne
pourrait pas se passer d’Internet et qu’il lui faudrait donc parvenir à le maîtriser.
C’est un des rares pays à avoir réussi à aseptiser son Réseau, le purgeant de
toute information critique du régime, tout en le développant. Quelle est la recette
miracle de ce géant de la censure ? Un savant mélange d’investissement, de
technologie et de diplomatie. »

 « La Chine a ensuite mis en place des systèmes lui permettant de censurer quasiment en temps réel les outils de discussion sur le Net. En alliant une cyberpolice pléthorique – on parle de dizaines de milliers de « cyberflics » – à des logiciels de censure sophistiqués, elle a réussi à vider les forums de discussion, très actifs il y a quelques années, de toute contestation politique. » [Page 83]

 

LE VIÊT-NAM : « DUR SUR L’HOMME »

« En matière de contrôle du Réseau, le Viêt-nam suit très scrupuleusement l’exemple chinois. S’il existe toutefois un domaine dans lequel ce pays n’est pas à la traîne par rapport à la Chine, c’est bien la répression envers les cyberdissidents et les bloggers. Trois d’entre eux sont détenus depuis plus de trois ans pour avoir osé s’exprimer en faveur de la démocratie sur Internet. »  [Page 84]

 

 LA TUNISIE : LE MODÈLE

« Le président Ben Ali, dont la famille dispose d’un monopole sur l’exploitation du Réseau, a mis en place un système très efficace de censure d’Internet. »

… « Malgré cela, la Tunisie reçoit les louanges de la communauté internationale pour sa gestion d’Internet. C’est en effet ce pays qui a été désigné par l’Union internationale des télécommunications (UIT), organisation du système des Nations unies, pour accueillir le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI), en novembre 2005. La Tunisie comme modèle de développement du Net… L’idée fait froid dans le dos. »  [Page 84]

 

L’IRAN : CAPABLE DU PIRE… COMME DU PIRE

« Si Téhéran est capable du pire en matière de censure, il détient également le record de bloggers interpellés et emprisonnés de l’automne 2004 à l’été 2005 : près d’une vingtaine d’entre eux sont passés par les geôles du pays pendant cette période ; trois d’entre eux s’y trouvaient encore au 1er septembre 2005. »  [Page 85]

 

CUBA : LA LÉGENDE

« A Cuba, accéder au Réseau est un privilège auquel très peu ont droit et qui nécessite une autorisation expresse du Parti unique. Même si on parvient à se connecter à la Toile, le plus souvent de manière illégale, c’est de toute façon à un Internet ultra-censuré qu’on accède. »  [Page 85]

 

 L’ARABIE SAOUDITE : DROIT AU BUT

« L’agence gouvernementale chargée d’« assainir » le Web, l’Internet Service Unit (ISU), est fière d’annoncer qu’elle bloque près de 400 000 sites. Elle a même mis en place un formulaire en ligne permettant aux internautes de proposer de nouvelles pages Web à censurer. Selon les termes de l’ISU, l’objectif du filtrage est de "préserver les citoyens de contenus". » [Page 86]

 

L’OUZBÉKISTAN : LE FEINTEUR

« Il n’existe aucune possibilité de censurer l’Internet du pays », a déclaré, en juin 2005, le ministre de l’Information ouzbek. Une telle affirmation fait sourire dans un pays où tous les sites d’opposition sont inaccessibles et où les journalistes en ligne sont régulièrement victimes de menaces et d’agressions. »  [Page 86]

 

 * Les auteurs 

 

JULIEN PAIN

Responsable du bureau Internet et Libertés de Reporters sans frontières
 

DAN GILLMOR

Dan Gillmor est le fondateur de Grassroot Media Inc., une entreprise qui vise à faciliter et promouvoir le journalisme « à la racine» (grassroot journalism). Il est l’auteur de « Nous, les médias : le journalisme ‘à la racine’ par le peuple et pour le peuple » (O’Reilly Media, 2004).

Son blog : http://bayosphere.com/blog/dangillmor

 

OLIVIER ANDRIEU

Olivier Andrieu est consultant indépendant dans le domaine d’Internet et spécialiste du référencement sur les moteurs de recherche. Il est également l’éditeur du site www.abondance.com.

 

MARK GLASER

Mark Glaser est journaliste pour Online Jounalism Review (www.ojr.org), une publication de l’Annenberg School for Communication de l’université de Southern California. Il est indépendant et travaille à San Francisco. Vous pouvez lui écrire à glaze@sprintmail.com.

 

ETHAN ZUCKERMAN

Ethan Zuckerman est un étudiant chercheur au Berkman Center for Internet and Society de l’école de droit de Harvard. Sa recherche porte sur les relations entre le journalisme citoyen et les médias conventionnels, en particulier dans les pays en développement. Il est le fondateur et l’ancien directeur de Geekcorps, une organisation à but non lucratif qui travaille sur les technologies éducatives dans les pays en développement. Il est également l’un des fondateurs de l’entreprise d’hébergement Tripod.

 

NART VILLENEUVE

Nart Villeneuve est directeur de la recherche technique à Citizen Lab, un laboratoire interdisciplinaire basé au Centre Munk pour les études internationales, à l’université de Toronto (Canada). En tant que développeur de programmes et enseignant, il travaille actuellement sur l’initiative OpenNet (ONI : OpenNet Initiative), documentant les pratiques de surveillance et de filtrage de contenus Internet dans le monde. Il travaille également sur l’évaluation des technologies de contournement.

Il s’intéresse par ailleurs à l’activité des hackers (l’hacktivisme), au cyberterrorisme et à la sécurité d’Internet. Nart Villeneuve a été récemment diplômé par l’université de Toronto dans le cadre du programme d’études sur la paix et les conflits (Peace and Conflict Studies). Remerciements : Michelle Levesque, Derek Bambauer et Bennett Haselton.


 

** Les témoignages de reporters sans frontières dans différents pays.

JULIEN PAIN

Responsable du bureau Internet et Libertés de Reporters sans frontières

 

(voir les pages 83 à 86 du guide pour trouver leur idéologie et leur façon de faire dans le monde des bloggers)

 

ALLEMAGNE

« UN MOYEN RAPIDE ET EFFICACE DE PUBLIER DU CONTENU »

Markus Beckedahl

Netzpolitik.org

 

BAHREÏN

LE LIEU DE PRÉDILECTION POUR PARTAGER MES OPINIONS ET EN DISCUTER

Chan’ad Bahraini

  

ETATS-UNIS

« MAINTENANT, JE PEUX ÉCRIRE CE QUE JE PENSE »

Jay Rosen / Press Think

 

HONG KONG

GLUTTER, UNE PROMESSE TENUE

Yan Sham-Shackleton

  

IRAN

« UN BLOG PERMET D’ÉCRIRE LIBREMENT »

Arash Sigarchi

 

NÉPAL

« DIFFUSER AU RESTE DU MONDE DE L’INFORMATION SUR MON PAYS »

Radio Free Nepal (RFN)

 

 
 

3 commentaires sur “Le rôle des blogs dans la liberté d’expression

  • Il y a une entrevue des plus intéressantes à lire avec M. Julien Pain qui gère le bureau Internet de RSF et qui s\’occupe justement de défendre l\’expression libre sur l\’Internet. "Reporters sans frontières et le phénomène des blogs"http://www.jacklang.net/rubriques/article3.php3?id_article=847J\’aime bien la dernière question au sujet de la différence entre les bloggeurs et les journalistes:"Les bloggers vont-ils vraiment s’apparenter à des journalistes ?Le journalisme doit rester assez codifié. Je ne pense pas que les bloggers vont prendre le pas sur les journalistes et que l’on n’aura plus de journalistes dans le futur. Et je ne le souhaite pas. Sur de l’information immédiate ou du commentaire, le blogger peut être intéressant. Mais le travail d’enquête que fait le journaliste, aller sur le terrain, rencontrer des gens, en tirer des infos et les vérifier, demande du temps et de la méthodologie. C’est un métier et il faut des journalistes qui soient capables de produire ce type d’information. Je n’attends pas des bloggers qu’ils fassent la même chose. Mais je ne pense pas que la majorité des bloggers ait envie d’être reconnu comme des journalistes avec la carte de presse.Propos recueillis par Mathieu Maire du Poset"

  • On peut lire, entre autres, sur le blog « VEILLE PÉDAGOGIQUE » de Jean Paul Pinte que d’une société industrielle nous sommes passés à une société de l’information, c’est-à-dire à une société de la connaissance. L’avènement des TIC, du réseau Internet et de la mondialisation, a réduit notre monde à la taille d’un village. L’enjeu c’est de passer d’une société du savoir à une société des savoirs partagés. C’est du moins ce que voulait faire ressortir le SMSI, le Sommet Mondial sur la Société de l’Information qui s\’est terminé le 18 novembre 2005 à Tunis.Pour lire un compte rendu de ces trois journées axées sur la gouvernance d\’Internet et la fracture numérique, vous pouvez télécharger le document à partir de l’article du 20 novembre 2005: « Synthèse SMSI TUNIS 2005 ».http://veillepedagogique.blog.lemonde.fr/veillepedagogique/Il en ressort principalement que la liberté d’expression est au cœur du débat mais s’avère encore malheureusement une question politique pour certains pays. Exactement comme les « Reporters sans frontières » essaient de nous le faire comprendre. Comment est-il possible de partager des savoirs si la libre communication est interdite sur certains réseaux de la Toile Mondiale?

  • Un chroniqueur du blog de l\’Actualité, au Québec, le journaliste Michel Vastel, nous donne des nouvelles d\’un prisonnier journaliste chinois, Shi Tao, qu\’il a accepté de parrainer à la demande de Reporters sans frontières:
     
    (article du 27 avril 2006)
    http://forums.lactualite.com/advansis/?mod=for&act=dip&pid=805&tid=805&eid=1&so=1&ps=10&sb=1#comments
     
    Il dit, entre autres:
    "Reporters sans frontières s\’inquiète des conditions de détention de Shi Tao et demande sa libération pour raisons médicales".
     

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